11.9.13

10 septembre 2013



Le temps et sa géographie

La géographie a changé, la lumière de septembre est particulièrement belle au détour d'une rue : c'est que nous sommes dans la bonne ville de Québec, pour peu de temps. Québec n'est plus ce qu'elle était, on le dit : gentrifiée, grugée par les touristes et les manœuvres des promoteurs, elle aurait perdu ses repaires et ses repères. Pourtant, pour l'éditeur de passage, il y reste bien des charmes. Des endroits pour lire, des endroits pour boire et surtout — ça ne s'enlève pas facilement — des rues pentues qui ménagent des surprises, qui imposent l'effort. Quelque chose de Lisbonne, si on veut. Le Tage n'est pas loin. C'était sa lumière dans le ciel aujourd'hui. Il n'empêche que c'est bien triste, cette disparition de tant de librairies, ce magasinage, qui partout veut remplacer le flânage. Ça frappe peut-être davantage dans une ville comme Québec, qui a beaucoup perdu, mais toutes les grandes villes d'Amérique et d'Europe vivent cette disparition. Peut-être que derrière les apparences, derrière les façades, une fois franchies les portes closes, des conversations se croisent, des livres s'écrivent, des rires ébranlent et qu'une ville secrète est en préparation. La forme d'une ville change plus vite que le cœur d'un mortel : c'est sans doute tant mieux. Les terriens restent à inventer, leurs villes aussi.



En tête

L'Oie se prépare une saison sous le signe du livre d'ymages (pour conserver l'orthographe d'Alfred Jarry). Fantastic Plotte de Julie Doucet est déjà sous presse. En faisant la mise en page, il était impossible de ne pas sourire, de ne pas s'enthousiasmer. C'est que ce livre, qui contient les toutes premières bd de Julie Doucet, est une mine d'or explosive. Il y a là toute la subversion de la pensée punk des années 80 mais à son meilleur, rendue avec un talent ébouriffant. Ensuite, un bijou, une œuvre angoissée et parfaite : Mélasse de Guillaume Pelletier, dont on parle déjà ici. Et puis, le livre d'ymages qui s'éloigne le plus de la bande dessinée : le magnifique Petit guide du Plan Nord de Michel Hellman, entièrement réalisé en sacs de poubelle découpés ! Un exemple vaut mille mots, ici. Tout cela, très bientôt, avant que ne se dissipent les brumes de l'automne.


À venir

Et puis, juste après, dès que les froids auront repris leurs droits, nous aurons avec nous les grandes Fatigues de Pierre Peuchmaurd. Il s'agit de l'intégrale des aphorismes publiés de son vivant, soit les recueils À l'usage de Delphine, L'Immaculée Déception et Le moineau par les cornes, auxquels s'ajoute un recueil inédit, La position du pissenlit. C'est la réponse qu'avait donnée Pierre Peuchmaurd aux grandes fatigues que lui causait le monde, une réponse pleine d'humour, d'éclairs poétiques, de découragement et d'espoir. Les aphorismes de Pierre Peuchmaurd, c'est aussi, si on veut, un appel aux terriens. Tout reste à faire — alors que vient l'hiver.




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